L’accomplissement d’une photo réussie. Celui d’un instant tributaire des éléments, des autres et de la chance, celui d’un lieu en dehors des sentiers battus et celui d’une image forte. Celle qui nous oblige à choisir notre camp, porterons-nous les yeux sur cette faille rocheuse qui est prête à nous envoyer valser à tout moment dans un grand fracas, ou nous attarderons-nous plutôt sur l’émerveillement qu’apporte cet horizon aux limites floues? La question a toute son importance et traduit largement notre état d’esprit.
Je suis particulièrement content de ce cliché et remercie ma mère qui une fois encore fût douée de l’inspiration nécessaire. Techniquement la présence dans le même tableau de : 1 la falaise dans toute sa verticalité- 2 le premier plateau – 3 le deuxième plateau – 4 la mer et 5 le ciel qui ne se distinguent que difficilement, donne sa puissance à la photo et fait ressortir la futilité des personnages. Contraste typique de la période humaniste où l’homme se perd devant l’immensité (cf: oeuvres de Friedrich).
Passé l’aspect culturel et technique c’est l’intervention d’un proche, dont l’attention première s’orienta brutalement vers la faille rocheuse à notre aplomb, qui m’a fait me rendre compte de l’importance des différences de ressenti et perception devant le cliché.
Comme tout être en cet endroit serait inconscient de ne pas être en connaissance du danger de la situation, la même personne le serait tout autant de ne focaliser son attention que sur cette faille rocheuse sans saisir la beauté du lieu.
Une métaphore simple mais particulièrement d’actualité dans une période où la peur a parfois tendance à nous faire oublier l’essentiel.
Comme pour ces quelques centimètres de pierre sicilienne (à Erice côte ouest) qui nous retiennent, la réponse est souvent à chercher du coté de l’équilibre.